Les excuses d'une ex-terroriste et le "oui" au Glyphosate
29 novembre 2017A la Une des journaux allemands aujourd'hui: le glyphosate, encore et toujours, mais aussi les excuses d'une ancienne terroriste, 40 ans après les faits. Cette terroriste, c'est Silke Maier-Witt, ancienne membre de la Fraction Armée Rouge, ou RAF. Elle n'a toutefois pas fait personnellement partie du groupe qui a enlevé, séquestré puis assassiné Hanns Martin Schleyer, le patron des patrons allemands. C'était en 1977. Aujourd'hui, quarante ans plus tard, Silke Maier-Witt a rencontré le fils de la victime pour lui demander pardon.
Douleur(s) et repentance
"On ne fait pas la paix avec ses amis, mais avec ses ennemis", écrit la Süddeutsche Zeitung, citant Itzhak Rabin. Le journal salue le "geste de réconciliation" esquissé par Silke Maier-Witt et rappelle que depuis 40 ans, les proches de Hanns Martin Schleyer réclament à ses assassins de briser le silence – car depuis 1977, on n'a pas réussi à établir qui, parmi les ravisseurs, a exécuté le patron des patrons.
Et la SZ tire un parallèle entre les terroristes de la RAF d'extrême-gauche des années 1970 et la génération d'avant, celle des nazis, "brutaux, arrogants, fanatiques, prêts à tuer quiconque était considéré par eux comme indigne de vivre". Avec pour différence que les nazis servaient le Mal tandis que les terroristes de la RAF étaient persuadés de tuer pour le Bien et la libération du monde du joug impérialiste.
La réconciliation est un long processus", analyse le quotidien de Munich. Contrairement au pardon accordé, elle suppose que tous les auteurs de crimes acceptent d'abandonner les mensonges sur lesquels ils ont construit leur existence et toutes les justifications qu'ils ont toujours avancées pour expliquer leurs actes. Les bourreaux doivent pour cela être prêts à se confronter à la douleur, celle de leurs victimes et de leurs proches, mais aussi la leur propre, celle qui les amène à reconnaître qu'ils ont eu tort.
La faiblesse d'Angela Merkel
"Le Glyphosate reste, le ministre aussi" titre avec ironie die tageszeitung avec un grand pouce dressé qui s'étale en Une pour signifier son approbation, sauf que le pouce en question est celui d'un squelette.
La taz publie un commentaire au vitriol suite au cavalier seul du ministre de l'Agriculture CSU Christian Schmidt, qui a décidé, au nom de l'Allemagne, de voter la prolongation de l'autorisation de l'herbicide de Monsanto en Europe alors qu'il avait reçu des instructions contraires de la chancelière.
Une preuve, pour la taz, de la faiblesse actuelle d'Angela Merkel, incapable de réagir de façon adéquate à l'affront qui risque de remettre en cause ses tentatives de négociations avec le SPD pour former un gouvernement. Le SPD avait en effet convenu avec la CDU au sein du cabinet sortant de ne pas dire "oui" au Glyphosate.
Pour la Frankfurter Allgemeine Zeitung aussi, Angela Merkel avait besoin de tout sauf de se brouiller avec le SPD sur qui elle compte désormais pour la prochaine coalition.
Ce scandale de "confiance rompue" arrive à point nommé pour l'aile du SPD qui a autant envie d'une troisième alliance avec les conservateurs que d'avaler une "cuiller de Glyphosate". Et le journal explique le geste du ministre issu de Bavière par les élections régionales prévues l'année prochaine dans son Land : la CSU, le parti au pouvoir en Bavière, a voulu abonder dans le sens des agriculteurs qui ne comprennent pas pourquoi on diabolise tant l'herbicide.
Le problème, c'est que la CDU a aussi besoin de la CSU pour former un gouvernement.
Les négociations entre les partis risquent donc de durer encore… un certain temps.