Un opposant à la junte guinéenne arrêté
27 décembre 2024En Guinée, plusieurs regroupements de partis politiques et d'organisations de la société civile opposés à la junte militaire appellent à des manifestations à partir du 6 janvier 2025. L'objectif est de protester contre la prolongation de la transition et donc du maintien au pouvoir des militaires qui ont renversé le président Alpha Condé le 5 septembre 2021. Pendant ce temps, les arrestations des voix critiques à l'égard de la junte militaire continuent de susciter l'inquiétude. Hier, le président du Mouvement démocratique libéral (MoDel), Aliou Bah, a été interpellé, puis placé en garde à vue. Il est poursuivi pour "offense" à l'encontre du chef de la junte, le général Mamady Doumbouya.
Réaction de Alseny Sall, chargé de communication de l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'homme et du citoyen (OGDH).
Alseny Sall: Sincèrement, cela ne nous surprend pas dans la mesure où, comme vous le savez depuis un certain temps, la junte au pouvoir est dans une logique de taire toutes les voix dissonantes.
Après avoir justement écrasé complètement la presse et évidemment embastillé les voix dissonantes, on est en train d'ériger le culte de la personnalité en mode de gouvernance.
Vous n'êtes pas sans savoir quand même qu'Aliou Bah, a finalement été inculpé pour "offense" au chef de la junte.
Quelqu'un comme Mamadi Doumbouya, qui s'était présenté le 5 septembre 2021 comme quelqu'un qui allait défendre des libertés, quelqu'un qui allait lutter contre le culte de la personnalité. Je pense qu'on est en train de ramer à contre-courant de l'histoire et c'est vraiment préoccupant.
Et c'est pourquoi nous avons interpellé directement le ministre de la Justice, qui est en même temps le ministre des Droits de l'homme, ainsi que le procureur général, afin qu'il prenne toutes les dispositions pour qu'Aliou Bah soit libéré. Parce que ce qui s'est passé est une violation, notamment de l'article 18 de la Charte de la transition, mais aussi des articles 8 et 12 de cette même Charte. Donc, nous ne pouvons pas accepter cela.
DW: La transition en Guinée ne va pas s'achever fin 2024, comme s'y étaient engagés les militaires qui sont au pouvoir. La date ne sera pas respectée en raison de la refondation de l'Etat, a justifié il y a quelques jours le porte-parole du gouvernement guinéen, Ousmane Gaoual Diallo. Quelle est votre réaction?
Alseny Sall: Ça a toujours été le problème du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD). Il n'a jamais voulu établir un consensus sur le calendrier électoral en dépit des protestations des acteurs représentatifs de la nation. Je parle des forces politiques, mais aussi des forces sociales qui ont lutté en tout cas contre le troisième mandat de Alpha Condé et qui ont débouché à la prise du pouvoir par l'armée qui s'était engagée justement à faire de la justice la boussole, mais aussi en tout cas à travailler pour le respect des principes démocratiques dans le pays.
DW: Et pour protester contre la prolongation de la transition par les militaires, les principaux partis d'opposition et plusieurs organisations de la société civile guinéenne ont appelé à des manifestations à Conakry à partir du 6 janvier 2025. Est ce que vous ne craignez pas de nouvelles répressions ?
Alseny Sall: Évidemment, il y a encore des craintes à l'heure qu'il est. Dans la mesure où même la presse n'est pas tolérée. Les citoyens ne peuvent même pas s'exprimer librement. C'est décevant.